C’est le point de vue du Conseil de Presse du Québec (CPQ), qui, dans une décision rendue le 27 juin dernier, statue que les inexactitudes des informations publiées via cette carte en septembre dernier par le Journal de Montréal, exagèrent l’étendue du phénomène des agressions sexuelles et insécurisent inutilement le citoyen.
Par Hélène Roulot-Ganzmann
C’est le point de vue du Conseil de Presse du Québec (CPQ), qui, dans une décision rendue le 27 juin dernier, statue que les inexactitudes des informations publiées via cette carte en septembre dernier par le Journal de Montréal, exagèrent l’étendue du phénomène des agressions sexuelles et insécurisent inutilement le citoyen.
Par Hélène Roulot-Ganzmann
Principal grief, la non différenciation entre les personnes simplement accusées et celles qui ont été reconnues coupables par un tribunal.
«Le Conseil a été clément et n’a pas retenu la plainte concernant l’atteinte à la vie privée et à la présomption d’innocence, explique Guy Amyot, Secrétaire général du CPQ. Parce que le journal ne donne ni les noms, ni les adresses exactes des personnes. Le zoom ne permet pas non plus d’aller au plus proche. Nous n’avons cependant pas pu faire l’exercice pour chacun des cas, mais il y a certainement des endroits où la densité est moins importante qu’au centre-ville de Montréal et où il ne doit pas y avoir plus qu’une maison dans la zone pointée.»
Retour en arrière: en septembre dernier, le Journal de Montréal lance une bombe en publiant, pour la première fois au Québec, une carte des agresseurs sexuels, pratique courante aux États-Unis et dans le reste du Canada. Troisième volet d’une série de quatre reportages sur l’État de la délinquance sexuelle.
Compilation de données
«Un travail audacieux et titanesque, note Marc Pigeon, adjoint au directeur de l’information, responsable des affaires policières et judiciaires au Journal de Montréal. Nous souhaitions avoir accès au registre national des délinquants sexuels, mais celui-ci n’est pas public et ça nous a été refusé. Durant un an, nous avons donc, semaine après semaine, recensé tous les gens qui sont passés par les tribunaux de Montréal, Québec, Laval et Longueuil pour des actes liés à la pédophilie. Nous voulions lancer un vaste débat de société sur la protection du public et pour cela, nous avions besoin de connaître l’ampleur du phénomène.»
En insérant son code postal, tout un chacun peut ainsi savoir s’il réside près d’une personne ayant eu affaire à la justice entre septembre 2011 et 2012 dans un dossier d’agression sexuelle. Son âge est mentionné ainsi que l’accusation portée (pornographie juvénile, agression, agression armée et/ou avec lésion). Pas de nuance entre accusé et coupable.
«C’était la première fois qu’un tel reportage se faisait, alors oui, il a matière à être amélioré, se défend Marc Pigeon. Dans le texte qui accompagnait la carte, nous expliquions clairement que toutes ces personnes n’étaient pas formellement condamnées. Cela dit, lorsque je travaillais sur le dossier, 90% des accusés s’avéraient coupables. Je ne pense donc pas que la carte déforme démesurément la réalité. Sachant également que parmi les personnes acquittées, certaines le sont parce que le jury n’est pas parvenu à condamner hors de tout doute raisonnable. Mais lorsqu’un policier décide qu’il a suffisamment de preuves pour envoyer un quidam devant les tribunaux. Lorsqu’un procureur estime qu’il y a matière à procès… ce n’est pas parce qu’on ne parvient pas à prouver la culpabilité de quelqu’un qu’il est innocent. Et moi, en tant que citoyen, ça m’intéresse de savoir que je vis à côté d’une personne qui a été suspectée d’agressions sexuelles sur mineur.»
Problème de titre
Dans un article publié sur 37e Avenue et intitulé «Une carte interactive blâmée», Steve Proulx conclut ainsi : «Ce n’est pas nécessairement l’existence de cette carte en elle-même qui pose problème, mais bien son titre. Il ne s’agissait pas d’une carte des agresseurs sexuels, mais bien d’une carte des individus accusés d’agressions sexuelles et, pour certains, toujours présumés innocents. On en convient, c’est moins vendeur. Mais plus vrai.»
Le Conseil de Presse précise en effet que, par quatre fois, le Journal de Montréal parle d’agresseurs sexuels, en lieu en place d’accusés. Un argument que Pierre Trudel, professeur titulaire au Centre de recherche en droit public (CRDP) de l’Université de Montréal, rejette pourtant.
«Ce flou n’est pas grave puisque les personnes ne sont pas nommées, estime-t-il. Oui, il est toujours préférable de faire la différence entre des personnes accusées et coupables, mais ne retrouve-t-on pas ce même flou dans tous les médias lorsqu’il s’agit des personnes mises en cause devant la Commission Charbonneau? Et le Conseil de Presse ne s’est pas exprimé là-dessus. Quoi qu’il en soit, le CPQ est un organisme qui n’a pas été créé par la loi, ajoute-t-il. Il rend des décisions d’ordre déontologique. Libre aux médias de suivre ses recommandations ou non.»
Bientôt une mise à jour?
En l’occurrence, les organes appartenant à Québécor ne reconnaissent pas la légitimité du Conseil, raison pour laquelle le Journal de Montréal n’est pas venu défendre sa position.
«On entend cependant sa décision et nous visons toujours l’amélioration, affirme Marc Pigeon. Le Journal de Montréal a la réputation de tenter des choses. C’est sûr qu’en demeurant à l’intérieur des balises, on risque moins de faire des erreurs. Mais la mise à jour de cette carte est à l’étude et si nous devions aller de l’avant, nous évaluerions toutes les critiques qui ont été émises à son égard.»
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