Combien gagne un journaliste en 2014?

D’après le guide des salaires selon les professions, Ă©ditĂ© par le gouvernement du QuĂ©bec, un journaliste gagnait en moyenne en 2011, 1069$ par semaine. Bien moins qu’un avocat ou un notaire (1314$), un pharmacien (1290$), un policier (1139$), un Ă©lectricien (1114$) ou encore un grutier (1189$). Une moyenne qui ne rend cependant pas bien compte des disparitĂ©s en fonction du mĂ©dia et de l’Ă©chelon.

D’après le guide des salaires selon les professions, Ă©ditĂ© par le gouvernement du QuĂ©bec, un journaliste gagnait en moyenne en 2011, 1069$ par semaine. Bien moins qu’un avocat ou un notaire (1314$), un pharmacien (1290$), un policier (1139$), un Ă©lectricien (1114$) ou encore un grutier (1189$). Une moyenne qui ne rend cependant pas bien compte des disparitĂ©s en fonction du mĂ©dia et de l’Ă©chelon. Deux ans après avoir  dĂ©jĂ  fait l’exercice, ProjetJ s’est de nouveau plongĂ© dans les conventions collectives des principales salles de nouvelles de la province.

Par Hélène Roulot-Ganzmann

La Presse

Non contente d’ĂŞtre la seule salle de nouvelles ayant augmentĂ© ses effectifs ces derniers mois, passant de 225 Ă  340 artisans afin de lancer sa version tablette, avec un salaire hebdomadaire de 1129 $ pour 35 heures de travail, La Presse demeure l’endroit au QuĂ©bec oĂą les journalistes sont les mieux payĂ©s. RĂ©munĂ©ration qui progresse rapidement pour atteindre 1418$ dès la cinquième annĂ©e. Les recherchistes perçoivent quant Ă  eux 1036$ Ă  leur entrĂ©e en poste et 1330$ cinq ans plus tard. Quant aux chroniqueurs et vidĂ©astes, ces derniers venus en grand nombre travailler pour La Presse+, ils dĂ©marrent Ă  1058$ et touchent 1357$ après cinq ans de service. Tout en haut de l’Ă©chelle salariale, les Ă©ditorialistes, caricaturistes et analystes plafonnent Ă  1690$.

Toutes ces rĂ©munĂ©rations sont consignĂ©es dans la dernière convention collective, entrĂ©e en vigueur en janvier 2014 et prĂ©voyant une augmentation de salaire pour tous d’environ 3% au 1er janvier 2015. Notons Ă©galement que la direction bĂ©nĂ©ficie jusqu’en novembre prochain d’un «rĂ©gime spĂ©cial» lui ayant permis d’embaucher autant de surnumĂ©raires qu’elle le jugeait nĂ©cessaire afin de roder La Presse+. Ă€ la fin de l’annĂ©e, leur nombre devra ĂŞtre revenu Ă  la normale, soit une trentaine sur les quatre-vingt deux Ă  l’emploi aujourd’hui.

Radio-Canada

Après dix-huit mois de blocage, les nĂ©gociations pour le renouvellement de la convention collective Ă  Radio-Canada ont abouti au dĂ©but du mois Ă  la reconduction pure et simple de l’ancienne, avec pour seul changement l’augmentation des salaires de 1,5% pour 2013 et 2014. Depuis le 1er avril dernier, un journaliste gagne 1015$ par semaine et un reporter national 1252$ lorsqu’ils entrent Ă  l’emploi, et respectivement 1179$ et 1387$ cinq ans plus tard. Un vidĂ©ojournaliste se voit offrir 1040$ hebdomadaire et 1244$ au bout de cinq ans, un recherchiste, 940$, puis 1099$, un correspondant Ă  l’Ă©tranger, 1307$, puis 1517$.

La reconduction de la convention collective court jusqu’au 28 fĂ©vrier 2015. La nĂ©gociation devrait donc reprendre Ă  partir du mois d’octobre dans un contexte peu favorable vu les dernières annonces de la direction prĂ©voyant jusqu’Ă  25% de (SCRC) rĂ©duction des effectifs d’ici 2020. Le Syndicat des communications de Radio-Canada est Ă©galement dans l’attente de la dĂ©cision du Conseil canadien des relations industrielles sur la fusion ou non des quatre syndicats reprĂ©sentant les employĂ©s du diffuseur public au QuĂ©bec et Ă  Moncton. Rappelons que l’un des points sur lesquels les nĂ©gociations achoppaient avec la direction portait sur le rattrapage salariale des services francophones vis-Ă -vis des services anglophones, ces derniers recevant en moyenne une rĂ©munĂ©ration supĂ©rieure de 6,85% pour un mĂŞme poste, mĂŞme Ă©chelon, mĂŞme anciennetĂ©.

Québecor

Ă€ TVA aussi, les nĂ©gociations pour renouveler la convention collective ont Ă©tĂ© longues et douloureuses mais un accord a finalement Ă©tĂ© trouvĂ© entre la direction et le syndicat et ce, jusqu’au 31 dĂ©cembre 2016. Au final les conditions salariales ne sont pas très diffĂ©rentes de celles offertes par le diffuseur public d’autant que la semaine de travail est de 35 heures, contre 37,5 heures Ă  Radio-Canada. Ainsi, un recherchiste ou un rĂ©dacteur web gagne 1029$ hebdomadaire la première annĂ©e et 1229$ au bout de cinq ans,  un rĂ©dacteur gagne 1067$, puis 1275$, un reporter, 1105$, puis 1321$, un lecteur de nouvelles, 1181$, puis 1412$ et un correspondant parlementaire, 1258$, puis 1504$.

Longtemps considĂ©rĂ©s comme les enfants gâtĂ©s de l’industrie mĂ©diatique quĂ©bĂ©coise, voire nord-amĂ©ricaine, thème que l’ex-patron Pierre-Karl PĂ©ladeau n’a eu de cesse de marteler lors du lock-out de 2009-2011, les employĂ©s du Journal de MontrĂ©al sont loin d’ĂŞtre aujourd’hui les plus nantis. Au sortir du conflit de travail, non seulement la salle de nouvelles a perdu environ les trois quart de ses troupes, mais ceux qui sont restĂ©s ou qui sont arrivĂ©s depuis, doivent composer avec une convention collective signĂ©e sous la contrainte et qui ne leur offre pas des conditions salariales idĂ©ales.

Ainsi, la semaine de travail de 37,5 heures est payĂ©e 834$ Ă  un recherchiste lorsqu’il entre en poste, et 1027$ après cinq ans d’expĂ©rience. Un journaliste, photographe ou caricaturiste touche quant Ă  lui 933$ la première annĂ©e et 1220$ la cinquième, un pupitreur, 1005$, puis 1499$. Notons Ă©galement que le lock-out a laissĂ© des traces dans la communautĂ© journalistique et parmi les finissants, et que l’atmosphère de travail au sein de la salle de nouvelles Ă  la rĂ©putation d’ĂŞtre tendue et stressante. Du fait du faible nombre d’employĂ©s ayant acceptĂ© de rĂ©intĂ©grer la rĂ©daction après le conflit et du turn-over important, peu de salariĂ©s n’ont aujourd’hui atteint les Ă©chelons supĂ©rieurs.

Le Devoir

En queue de peloton salarial, on trouve finalement Le Devoir. Un reporter qui entre dans la salle de nouvelles y gagne un salaire hebdomadaire (35 heures) de 741$, et cinq ans plus tard, il touche 978$. Ce n’est qu’au bout de sept ans qu’il atteint le salaire offert Ă  un reporter au premier Ă©chelon Ă  La Presse. Les correspondants parlementaires et autres Ă©ditorialistes touchent quant Ă  eux une prime de 103$ par semaine. Aussi, la convention collective est arrivĂ©e Ă  Ă©chĂ©ance Ă  la fin de l’annĂ©e dernière et d’après les informations obtenues par ProjetJ, les nĂ©gociations pour son renouvellement seraient ardues.

Les pigistes

On le voit donc, le journalisme ne fait pas partie des professions les mieux payĂ©es… et c’est encore plus vrai pour ceux qui choisissent d’exercer le mĂ©tier Ă  la pige. D’après un sondage effectuĂ© l’Ă©tĂ© dernier par l’Association des journalistes indĂ©pendants (AJIQ), ceux qui ont moins de cinq ans d’expĂ©rience dĂ©clarent des revenus annuels de 17537$, soit 337$ par semaine. Entre cinq et neuf ans d’anciennetĂ©, la moyenne hebdomadaire passe Ă  569$ et 762$ entre dix et quinze ans. Pire, en 2013, un journaliste indĂ©pendant gagne en moyenne 59% des revenus que touchait son homologue en 1981… pas Ă©tonnant si l’on considère que le tarif Ă  la pige n’a pas augmentĂ© depuis les annĂ©es 1970.

Selon Emploi-QuĂ©bec, environ 4000 journalistes Ă©taient en poste en 2011 et les perspectives seraient «acceptables» pour la pĂ©riode 2012-2016. Mais si tous les chiffres prĂ©sentĂ©s plus haut ne permettent  pas d’espĂ©rer de devenir riche en choisissant la voie du quatrième pouvoir, il faut prĂ©ciser qu’ils sont issus des grilles salariales inscrites dans les conventions collectives des diffĂ©rents mĂ©dias et sont donc, des salaires bruts de base. Ils sont ainsi souvent assortis d’avantages sociaux (congĂ©s payĂ©s, assurance maladie, fonds de retraite) divers et variĂ©s en fonction de l’employeur, avantages qui peuvent faire parfois toute la diffĂ©rence. Ils ne tiennent pas compte non plus des primes qui peuvent ĂŞtre nĂ©gociĂ©es au moment de l’embauche. Les chroniqueurs et autres animateurs peuvent ainsi multiplier plusieurs fois leur salaire, et leur rĂ©munĂ©ration est mĂŞme bien souvent nĂ©gociĂ©e par un agent. La reconnaissance des annĂ©es d’anciennetĂ© issues d’expĂ©riences professionnelles prĂ©cĂ©dentes est quant Ă  elle Ă  la discrĂ©tion du nouvel employeur.

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