Collaboration spéciale Marie-Noël Gagné & Jean-Philippe Théberge
Étudiants à l’Université Laval
Ces mauvaises blagues qui prennent d’assaut les médias depuis toujours peuvent aussi bien condamner leur auteur que lui assurer une enviable visibilité. Il suffit de penser aux Yes Men, qui multiplient les canulars de toutes sortes depuis 1993. Ce sont eux qui, en décembre dernier, lors de la Conférence de Copenhague, ont diffusé un faux communiqué de presse sur un site Internet imitant celui d’Environnement Canada. Ce communiqué annonçait un changement de cap majeur de la politique canadienne en ce qui a trait à la lutte contre l’émission des gaz à effets de serre. Quelques heures plus tard, plusieurs faux sites web sont aussi créés par les Yes Men pour démentir la nouvelle. Ce fut la confusion totale.
L’avènement des canulars médiatiques correspond évidemment à l’arrivée des médias de masse et à la place grandissante des faits divers dans les journaux.
Les premières victimes ont été les journaux du 18e siècle et, suivant ainsi l’émergence de nouveaux médias, les auteurs de ces blagues souvent à forte répercussion se sont attaqués à la radio, la télévision et commencent à faire des dommages sur Internet. En effet, selon le site NT2, «les pratiques canularesques trouvent un terrain particulièrement propice à leur fonctionnement sur le réseau Internet dans la mesure où celui-ci est un média largement informatif, incitant l’internaute à une certaine crédulité qui fait de lui une victime potentielle idéale.» ()
Des cas illustres
L’un des plus gros canulars médiatiques de l’histoire a sûrement été celui créé par Orson Welles le 30 octobre 1938. Welles, qui a entre autres réalisé le film Citizen Kane et écrit le roman de science-fiction La guerre des mondes, avait décidé de monter un radio-roman avec une troupe de théâtre, à partir du contenu de La guerre des mondes. Ce roman raconte la guerre qui survient entre les humains et les martiens, lorsque ceux-ci envahissent la Terre et répandent des gaz toxiques. Welles a interrompu une émission musicale diffusée sur les ondes de Radio CBS afin de présenter un extrait de la pièce. Bien que le public ait été averti à quelques reprises de la nature fictive de cette émission, beaucoup de gens ont cru à la réelle présence des extra-terrestres sur la Terre, causant émoi, chaos et même des suicides.
Bye Bye Belgium
Un autre canular qui est passé à l’histoire est celui monté de toutes pièces par la chaîne de télévision généraliste publique belge francophone, La Une. Remy Besson, dans un article publié sur le site Issuu, explique que «le 13 décembre 2006, l’émission Bye Bye Belgium diffusée en direct sur la RTBF alliait canular médiatique et anticipation en annonçant que la Belgique avait cessé d’exister.» Un article de Jean-Pierre Stroobants, publié dans le journal Le Monde résume bien le contexte de l’émission.
Le fait que ce canular soit monté de toutes pièces par un média, avec la contribution de l’État, a rendu celui-ci d’autant plus controversé et hors du commun pour un public habitué aux canulars provenant d’individus inconnus assoiffés de popularité.
Dans un article du Devoir, datant du 18 décembre 2006, il est mentionné que tous les participants à l’émission, incluant les personnes interrogées, la police et le palais royal, avaient été avertis que Bye Bye Belgium était un canular d’un bout à l’autre. Aucune fuite n’est survenue, pas même de la part des journalistes qui avaient été mis au courant de l’affaire dans l’après-midi précédant la diffusion.
Balloon Boy
Le jeudi 15 octobre dernier, dans le comté de Larimer, au Colorado, un événement a causé tout un émoi sur les ondes de CNN. Les images montraient un ballon expérimental volant à la dérive, hors de contrôle, avec supposément un jeune garçon de six ans à son bord. La mère pleurait, le père était apeuré et l’Amérique a fait chou gras de cette histoire. Pendant tout ce temps, le jeune Falcon était caché dans le garage. Ses parents jouaient la comédie.
Invités le même soir à l’émission Larry King Live, Falcon et sa famille ont fait le point sur l’affaire. Mais Falcon a avoué, en direct, que «Tout ça, c’était pour le spectacle.»
Le week-end suivant, la mère, Mayumi Heene «a déclaré à la police qu’elle et son mari Richard “avaient menti” aux autorités, que c’était un “canular”».
Tous ces cas ont eu pour conséquence de duper les médias et le public. Par leur nature, les canulars de Welles et de Bye Bye Belgium ont eu de forts impacts sur la société, entraînant des suicides ainsi que des conséquences réglementaires pour l’un et de fortes conséquences politiques pour l’autre. Internet sera-t-elle la prochaine plateforme à subir les graves assauts d’individus en quête de publicité?
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