Alors que le Québec se livre à son second sport national depuis 3 jours, la critique de la revue de fin d'année à la télévision, l'Agence QMI est dans l'embarras. L'agence de presse interne de Quebecor a dû se dissocier hier de propos tenus sur le compte Twitter d'un de ses pigistes à l'égard du Bye Bye 2011, du couple Cloutier Morissette et de Radio-Canada.

Alors que le Québec se livre à son second sport national depuis 3 jours, la critique de la revue de fin d'année à la télévision, l'Agence QMI est dans l'embarras. L'agence de presse interne de Quebecor a dû se dissocier hier de propos tenus sur le compte Twitter d'un de ses pigistes à l'égard du Bye Bye 2011, du couple Cloutier Morissette et de Radio-Canada.

Jorge Contreras, journaliste pigiste pour CNN, Univision, Televisa et l'Agence QMI, s'est rétracté et excusé affirmant que son ordinateur a été piraté et qu'il n'est donc pas l'auteur des messages en cause. «Jamais je ne mettrais ma carrière en péril en agissant de la sorte», a-t-il affirmé à La Presse. Pour sa part l'Agence QMI déclare qu'elle «ne peut ni confirmer ni infirmer» la défense du journaliste.

Son compte Twitter est à l'origine d'une série de tweets déplacés et insultants émis au cours du Bye Bye, le 31 au soir. On y qualifie l'émission de «nul à chier», soulignant à plusieurs reprises qu'il s'agit d'un gaspillage de fonds publics. Plusieurs messages soutiennent d'ailleurs la fronde du patron de Quebecor, Pierre Karl Péladeau, et d'une frange du gouvernement conservateur contre CBC/Radio-Canada. D'autres s'en prennent personnellement à l'animatrice Véronique Cloutier et à son conjoint, l'acteur Louis Morissette, script-éditeur de l'émission.

Si le coauteur de la série Mirador, Daniel Thibault, a écrit sur Twitter que «Jorge Contreras a au moins le mérite d'avoir écrit tout haut ce que Quebecor pense tout bas», l'entreprise est loin de se réjouir. «Jorge Contreras n'est pas un journaliste employé de Quebecor ou de l'Agence QMI: il est un pigiste dont les services sont retenus à l'occasion par l'Agence QMI, déclare-t-elle par voie de communiqué. Les propos qu'il tient sur Twitter n'engagent que lui et ne représentent pas la position de l'Agence QMI.»

Médias sociaux et diffamation

Jorge Contreras a effacé tous les messages en cause, mais le site potins.ameriquebec.net les avaient archivés au préalable. Ils demeurent donc tous en ligne. Le journaliste soupçonne une personne de son entourage d'avoir piraté son compte. Il a confié à La Presse avoir demandé les services d'un avocat dans le but d'intenter une poursuite en diffamation.

Selon les chercheurs Benoit Dupont, directeur du Centre international de criminologie comparée, et Vincent Gautrais, titulaire de la Chaire de l’Université de Montréal en droit de la sécurité et des affaires électroniques, la permanence de l'information en ligne est un facteur d'accroissement des poursuites pour diffamations liées aux médias sociaux.

«Contrairement à la radio ou à la télévision, ces propos demeurent en permanence sur le Web, au vu et au su de tous, écrit Vincent Gautrais dans Forum, le journal interne de l'Université de Montréal. Il y a là un potentiel d’atteinte à la réputation qui est sans doute plus grand dans les réseaux sociaux, maintenant que tout un chacun est capable de publier des informations.»

Dans le cadre du projet de recherche Les crimes dans le Web 2.0, les deux chercheurs ont analysé quelque 400 décisions prononcées par les tribunaux un peu partout dans le monde. Ils ont conclu que les médias sociaux décuplent les poursuites pour diffamations. Les poursuites pour ce délit correspondent à 15% des décisions judiciaires liées au Web 2.0 rendues aux États-Unis et au Canada et à un peu plus de 10% de celles rendues au Québec.

Déontologie journalistique

L'ancien directeur des émissions d'affaires publiques de la Télévision de Radio-Canada, Pierre Sormany, fait lui-même face à une poursuite en diffamation intentée par Jean Lapierre pour avoir tenu des propos à son égard son Facebook en octobre. Sanctionné pour non-respect des Normes et pratiques journalistiques de Radio-Canada, il a démissionné et pris la tête de Vélo Québec.

En 2010, plusieurs guides de déontologies et d'éthique journalistiques ont été modifiés pour tenir compte des réseaux sociaux. Celui de Radio-Canada précise que «l'expression d'opinions personnelles sur des sujets controversés ou d'ordre politique peut miner la crédibilité du journalisme de Radio-Canada et éroder la confiance de notre public». Celui de La Presse stipule que «tout ce qui est publié sur les médias sociaux et les blogues personnels peut être diffusé plus largement par un tiers, repris hors contexte et affecter la réputation du journaliste comme celle de son employeur».

Pour sa part, le Guide de déontologie des journalistes du Québec, édité par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), indique: «La nature sociale de ces réseaux implique que chaque propos qui y est échangé peut devenir public, malgré la possibilité de paramétrer les réglages de confidentialité. En conséquence, les journalistes ne doivent pas tenir dans les médias sociaux des propos qu’ils ne tiendraient pas en ondes ou dans leur publication.»

 

Voir aussi:

Lapierre contre Sormany: l'aveuglement 2.0