Les funérailles de Nicolo Rizzuto, qui
ont eu lieu hier dans la Petite-Italie, ont occupé bien des
journalistes toute la journée. Ils se sont en effet mêlés par
dizaine aux nombreux curieux massés devant l’église
Notre-Dame-de-la-Défense.

La semaine dernière déjà,
l’assassinat du patriarche de la mafia sicilienne de Montréal avait
fait couler beaucoup d’encre, s’arrogeant la quatrième place du top
cinq des actualités au Québec la semaine selon Influence
Communication, derrière trois autres concernant le Canadien de
Montréal et devant le prolongement de la mission canadienne en
Afghanistan.

En faisant une brève recherche dans le
système d’archivage Eureka on retrouve pas moins de 543 textes
traitant de Rizzuto au cours des sept derniers jours, ce qui n’inclut
pas les heures d’antenne que la radio et la télévision ont
consacrées au personnage. Hier seulement, les chaînes d’information
en continu, RDI et LCN, ont fait leurs choux gras des funérailles en
faisant un véritable événement médiatique.

L’information spectacle

Marie-France Bazzo, Paul Arcand et
Mario Dumont se sont désolés ce matin au 98,5 FM de l’importante
couverture accordée à l’évènement. Pour Paul Arcand, le volet
économique du dossier est important, car le clan Rizzuto contrôlait
une bonne partie de certains secteurs d’activités économiques,
néanmoins ce qui s’est dit hier n’était pas de cet ordre. On a
plutôt versé dans l’information spectacle, selon Marie-France
Bazzo, en parlant de la provenance des fleurs et des tenus des
veuves. Une dérive souvent attribuée à l’information en temps
réel.

En effet, s’exprimant sur «l’effet
CNN», l’analyste politique français Thierry Meyssan estime que «le
concept d’information continue consiste à diffuser en temps réel
des images d’un événement de sorte que les téléspectateurs
puissent en ressentir les émotions, voire éprouver la même
sensation que s’ils en étaient des acteurs». Pour lui, il s’agit
d’une «négation du journalisme», car ce métier «n’est pas une
technique de la description, mais un art de la compréhension».

L’intérêt public

Pour Mario Dumont, les chaînes
d’information en continu se sont donné le mandat de rendre compte
non pas de ce qui est important, mais de ce qui pique la curiosité
des gens. L’intérêt du public supplante donc l’intérêt
public
d’après l’ex-politicien.

Comme l’a montré le cas Legendre
récemment, la définition de l’intérêt public ne fait pas
l’unanimité. Ni, le guide de déontologie de la Fédération
professionnelle des journalistes, ni le Conseil de presse, ni les
normes et pratiques journalistiques de Radio-Canada ne définissent
clairement cette notion. Cependant, le guide éditorial de la BBC
pose des balises.

Il indique que l’intérêt public
inclut: exposer et détecter des crimes, exposer des comportements
anti-sociaux, empêcher que le public soit trompé par les actions ou
affirmations d’un individu ou d’une organisation, révéler des
informations qui permettent au public de prendre des décisions
informées.

À partir de ses balises,
jugez-vous que les funérailles de Nicolo Rizzuto ont bénéficié
d’une couverture médiatique adéquate?