Les parlementaires australiens étudient
en ce moment même la possibilité d’adopter une loi pour protéger
les sources journalistiques. À l’heure actuelle, la législation
australienne est similaire à celle qui prévaut au Canada,
c’est-à-dire que le droit des journalistes de protéger leurs
sources n’est pas absolu et relève du cas par cas.

En Australie, le député indépendant
Andrew Wilkie
veut changer la donne en s’inspirant du modèle néo-zélandais.
Dans ce pays, la loi étant en faveur de la confidentialité, ceux
qui veulent découvrir l’identité des sources confidentielles des
journalistes ont la responsabilité de persuader un juge de renverser
la présomption de la loi.

L’éditrice de The Australian,
Creina Chapman, s’est réjouit de la démarche du député Wilkie
tout en espérant que l’ensemble des pays du Commonwealth lui emboîteront le pas.

La loi au Canada

Au Canada, ce n’est pas la
confidentialité qui prime, mais l’intérêt public. C’est pour quoi
un journaliste doit être en mesure de démontrer que l’intérêt du
public à la protection des sources secrètes l’emporte sur l’intérêt
du public à la production de documents ou informations considérés
comme une preuve, comme nous expliquait le juriste Pierre Trudel,
professeur titulaire au Centre de recherche en droit public de
l’Université de Montréal au début du mois.

En vertu de cette loi, qui est pourtant
contraire à la Déclaration des droits et devoirs des journalistes
signée à Munich en 1971 qui impose à tous les journalistes de ne
pas révéler leurs sources, le National Post a récemment été
contraint de remettre à la Gendarmerie royale du Canada des
documents prouvant un conflit d’intérêts entre la Banque
canadienne de développement et un proche de Jean Chrétien.

Un projet de loi sur les tablettes

En avril 2007, le député Serge
Ménard, porte-parole du Bloc Québécois en matière de Justice, a
déposé un projet de loi privé allant dans la même veine que celui
du député australien. Il
est cependant mort au feuilleton avec la fin de la session
parlementaire et Serge Ménard n’a, depuis, jamais eu l’occasion de
le remettre à l’ordre du jour. Plus de trois ans plus tard, c’est
cependant un sujet qui lui tient toujours à coeur.

«Si
l’occasion se présente, c’est évident que je présenterai à
nouveau ce projet de loi, que j’ai amendé suite à des
consultations. Mais nous sommes 308 députés, donc c’est vraiment le
hasard qui détermine qui a l’occasion de déposer un projet de loi
privé», explique-t-il.

Son
projet de loi réclame non pas une immunité constitutionnelle, mais
«une protection relative». En effet, selon ce projet de loi, la
confidentialité prime sauf si le plaignant démontre que les
documents confidentiels ont «une
importance déterminante et qu’ils ne peuvent être mis en preuve
par un autre moyen».

Le
modèle belge

Critique
de la législation canadienne, Reporters sans frontières (RSF)
estime que «la protection des sources ne peut être jugée au cas
par cas» (déclaration de RSF en mai dernier suite au jugement de la
Cour suprême conservant le National
Post
).
L’organisme encourage plutôt le Canada et les autres pays, dont
l’Australie, à s’inspirer du modèle belge, dont la législation est
la plus avancée en matière de protection journalistique.

Dans
ce pays, depuis 2005, la protection des sources journalistiques ne
peut être restreinte que dans des situations exceptionnelles et
limitées, soit la «prévention des crimes ou délits constituant
une menace grave pour l’intégrité des personnes». Cette loi va
dans le sens de l’arrêt de principe du 27 mars 1996 de la Cour
européenne des droits de l’homme dit «arrêt Goodwin », qui a
expressément reconnu le secret des sources des journalistes comme
l’une des pierres angulaires de la liberté de la presse.

Voir aussi: le secret des journaliste est-il protégé?