Il y a un an, Radio-Canada réalisait l'intégration en regroupant ses journalistes de la radio et de la télévision dans une même salle des nouvelles. Journaliste à la Première chaîne, Chantal Francœur, a elle-même vécu le processus comme un choc et a décidé d'y consacrer ses recherches doctorales à l'Université Concordia. Après avoir présenté une entrevue avec la chercheuse et des illustrations contenus dans sa thèse, nous en publions aujourd'hui un nouvel extrait.

 

Il y a un an, Radio-Canada réalisait l'intégration en regroupant ses journalistes de la radio et de la télévision dans une même salle des nouvelles. Journaliste à la Première chaîne, Chantal Francœur, a elle-même vécu le processus comme un choc et a décidé d'y consacrer ses recherches doctorales à l'Université Concordia. Après avoir présenté une entrevue avec la chercheuse et des illustrations contenus dans sa thèse, nous en publions aujourd'hui un nouvel extrait.

 

>> Intégration à Radio-Canada: le choc des cultures (1ère partie) – extraits de la thèse illustrant l'impact humain de l'intégration <<

>> Intégration à Radio-Canada: le choc des cultures (2e partie) – entrevue avec Chantal Francœur <<

 

Si Chantal Francœur s'inquiète des effets néfastes de l'intégration sur la qualité de l'information, elle y voit également une occasion de donner un nouvel élan à la profession:

L’intégration ouvre la porte à de nouvelles explorations journalistiques. Les journalistes intégrés changent d’identité, ils sont plongés dans une nouvelle culture qui n’existe pas encore, qu’ils peuvent créer. «We’re forming a new culture», dit justement Jennifer McGuire, qui a présidé l’intégration chez les cousins de la CBC.

On l’a vu, déjà des journalistes des modules d’information se réjouissent de pouvoir brainstormer avec des collègues. De pouvoir développer des nouvelles méthodes journalistiques. D’enrichir le contenu web. De voir s’ouvrir de nouveaux horizons, des nouveaux champs de connaissance : «C’est fabuleux» et «on est dans un chaos créatif. On est en exploration. On a le droit de faire des erreurs. C’est merveilleux» disent les cadres.

Le fait d’avoir à réfléchir à plusieurs plateformes oblige les journalistes à voir leur matériel et leur pratique différemment. Si leurs œillères disparaissent? Si les formats journalistiques changent, quelle nouvelle information peut être exposée, offerte? Les artisans ont en effet du pouvoir sur les technologies institutionnelles, sur les méthodes, les procédés journalistiques. Ils peuvent manoeuvrer, trouver des façons de fonctionner nouvelles, établir de nouveaux réseaux de relations. Ils peuvent «batailler» sur ce terrain.

(…) Où mènerait une telle quête, une telle recherche de l’esthétique du choc, du texte de jouissance journalistique? Difficile de dire mais l’intégration ouvre la porte à de nouveaux codes, à de nouveaux formats. Des artisans trépignent d’impatience à l’idée «d’essayer». Comme ce journaliste radio, qui a des projets web: «faire des trucs multimédia avec photo, texte». Des cadres semblent vouloir encourager ces explorations: «On a le droit de faire des erreurs» et «On est chanceux. J’ai jamais vu autant d’opportunités, on est dans une période de révolution, de changements très rapides» dit justement une cadre.

Une idée de «bataille» serait celle de modifier l’approche de l’intégration, en gardant l’aspect multiplateforme mais en modifiant les tâches des journalistes: avoir des journalistes audio, des journalistes vidéo, et des journalistes texte plutôt que des journalistes multiplateformes radio-télé-web. Ainsi les cultures d’origine seraient protégées et les distributions multiplateformes seraient assurées. L’impérialisme culturel télé serait aussi maté.

Une journaliste audio préparerait du contenu pour la radio, le web, les services numériques, en travaillant avec son mini-disque et en profitant de tous les avantages associés à la légèreté et à l’intimité de la radio. Elle baignerait dans la culture audio. Un journaliste vidéo pourrait maintenir son identité de journaliste télé, continuer de travailler avec un réalisateur et un caméraman, distribuer ses images et ses reportages télé sur toutes les plateformes, et continuer de jouir de l’impact fort des images. Même chose pour les journalistes de l’écrit.

(…) L’intégration met donc de l’engrais sur le terreau fertile de la créativité journalistique.C’est une occasion à saisir pour les journalistes radio-canadiens. Leurs discours vérité journalistiques pourraient élargir le discours vérité radio-canadien.

 

Voir aussi:

Radio-Canada: début de la cohabitation entre journalistes de la radio et de la télé

Rencontre avec le nouveau patron de la radio de Radio-Canada