Il y a un an, Radio-Canada réalisait l'intégration en regroupant ses journalistes de la radio et de la télévision dans une même salle des nouvelles. Journaliste à la Première chaîne, Chantal Francœur a elle-même vécu le processus comme un choc et a décidé d'y consacrer ses recherches doctorales à l'Université Concordia. Nous publions ici deux courts extraits de sa thèse.
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Il y a un an, Radio-Canada réalisait l'intégration en regroupant ses journalistes de la radio et de la télévision dans une même salle des nouvelles. Journaliste à la Première chaîne, Chantal Francœur a elle-même vécu le processus comme un choc et a décidé d'y consacrer ses recherches doctorales à l'Université Concordia. Nous publions ici deux courts extraits de sa thèse.
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Pour illustrer chaque partie de son texte, Chantal Francœur a inséré le verbatim d'un topo qu'elle aurait pu faire pour la radio à partir de ses entrevues de recherche. En voici un illustrant le choc identitaire vécu par les journalistes:
Précède: Les journalistes de Radio-Canada perçoivent l’intégration comme un changement de culture exigeant. Leur identité professionnelle se transforme avec la fusion des équipes radio, télé et web. L’adaptation à la culture d’un nouveau média trouble même les journalistes les plus expérimentés. Chantal Francoeur suit ce dossier:
NARRATION : Les premières expériences de journalisme multiplateforme ébranlent la personnalité des artisans de Radio-Canada. Ils deviennent hésitants quand on leur demande de se présenter :
(CLIPS journalistes back-à-back): «Je suis journaliste, heu, dans un premier temps à la télé» … «Je suis d’abord et avant tout un reporter télé mais je suis surtout un producteur de contenu, pour Radio-Canada»… «Je suis journaliste originalement à la radio, de plus en plus à la télé et sur le web. Je suis en train d’être intégré.»
NARRATION: Le travail multi plateforme change les habitudes ancrées depuis longtemps chez les journalistes radio ou télé. Certains y sont réfractaires, comme ce journaliste télé :
(CLIP journaliste télé): «Ça ne m’intéresse pas la radio. On ne tourne pas de la même
NARRATION: Le travail multi plateforme change les habitudes ancrées depuis longtemps chez les journalistes radio ou télé. Certains y sont réfractaires, comme cejournaliste télé :
NARRATION: D’autres journalistes qui acceptent d’expérimenter le travail multi plateforme trouvent l’exercice difficile:
(CLIP journaliste radio): «C’est bizarre ce qui se passe dans la tête. On devient tout mêlé. Surtout dans les longs reportages. On a la tête pleine. Les neurones qui explosent. »
NARRATION: La date officielle de la fusion des équipes de journalistes de Radio-Canada est le 7 juin.
Chantal Francoeur, Montréal.
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La journaliste a également enrichi son texte de nombreuses anecdotes permettant de comprendre l'impact humain de l'intégration. Celle-ci illustre la gymnastique intellectuelle et logistique qu'engendre la nouvelle organisation du travail:
Anecdote: Une journaliste radio travaille à la version télé de son reportage. Elle se sent analphabète. Le vocabulaire du réalisateur, du caméraman et du monteur crée un monde impénétrable : «two shot, shot list, bridge, stand up, plan de coupe, EDL, ODC, packaging, jump cut, …» Il y a une limite au nombre de fois où elle peut demander «qu’est-ce que c’est? Qu’est-ce que ça veut dire?» Elle essaie de déduire.
Elle apprend, trop tard, qu’il vaut mieux choisir des angles différents pour l’apparition des interviewés à la télé. Il vaut mieux alterner, qu’ils ne soient pas toujours à droite ou à gauche de l’écran. Même chose pour le stand up ou le bridge avec la journaliste en gros plan. À droite ou à gauche de l’écran mais pas du même côté que le précédent interviewé. «Je me place face à la caméra ou trois-quart pour faire mon pont ?» demande la journaliste. «Trois-quart.» «Pourquoi?» «Parce que ça fait plus dynamique.» «Ah oui? Ah bon.»
Au moment d’enregistrer sa voix, des collègues télé lui disent: «Ne fais pas comme à la radio. Il faut projeter plus en télé. Parce que tu es en compétition avec les images. Tu te bâts pour être entendue malgré les images. Parle plus fort, de façon plus affirmée.» La journaliste demande: «Pour le stand up, je porte mon chapeau ou je l’enlève? On gèle dehors.» «Tu l’enlèves.» «Tu le portes.» Pas de consensus là dessus.
L’anecdote raconte comment se sent la journaliste radio qui travaille pour la télé: elle baigne dans une autre culture. La culture télé n’est pas la culture radio. Le vocabulaire, le fonctionnement, les préoccupations, les approches diffèrent. L’intégration, pour les journalistes, est un plongeon dans une autre culture.
Ne manquez pas notre entrevue avec Chantal Francœur demain!
Voir aussi:
Radio-Canada: début de la cohabitation entre journalistes de la radio et de la télé
Rencontre avec le nouveau patron de la radio de Radio-Canada
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