Le travail des
journalistes restera encadré à l’intérieur des palais de justice
québécois. La Cour suprême a en effet statué ce matin que les
limites actuellement imposées aux médias dans l’enceinte des
tribunaux sont une atteinte minimale au travail journalistique et ne
doivent donc pas être redéfinies.

En
vertu de ce jugement unanime, il demeurera interdit de filmer les
témoins et les accusés au sortir des salles d’audience ou de les
interviewer dans les corridors des palais de justice.
Ces
limites ont été imposées en 2005 à la suite d’incidents liés
à la présence de caméras, notamment lors des mégaprocès des Hells
Angels. Elles visent à protéger les témoins et les victimes et à
veiller au bon déroulement des procès.

Ces règles obligent les journalistes à
filmer et à faire des interviews uniquement dans les endroits
spécifiquement aménagés à cet effet. Ils doivent donc convaincre
leurs cibles de s’y rendre pour pouvoir les interviewer au lieu de
leur tendre directement leur micro à la sortie des salles
d’audience. Ils doivent également rapporter eux-mêmes les propos
tenus par les témoins puisque la diffusion
d’enregistrements officiels des audiences est proscrite
.

Plusieurs
médias, dont Radio-Canada,
La
Presse
et TVA,
contestaient ces règles. Ils y voyaient une atteinte à la liberté
de la presse et au droit du public à l’information, donc une
violation de la Charte canadienne des droits et libertés. Mais la
Cour suprême estime qu’il s’agit de limites acceptables dans la
conciliation des droits garantis par la charte et une «saine
administration» de la justice.

Bien
qu’il juge «malheureux et excessif» que le plus haut tribunal du
pays ait maintenu l’encadrement des médias, Me François Demers, qui
représentait les médias, s’est réjoui que la Cour ait
légitimé
la présence des journalistes dans les palais de justice. Dans
certaines provinces, les journalistes sont en effet relégués à
l’extérieur, sur le trottoir.

(ajout post-publication) La Fédération professionnelle des journalistes du Québec s’est cependant dite déçue de ce jugement. «C’est comme si la Cour suprême faisait
fi de l’évolution des médias, et qu’elle prenait ses décisions comme
s’il n’existait qu’une forme de journalisme, soit le journalisme écrit», indique-t-elle par voie de communiqué.

Pour la fédération, «ce n’est donc pas une journée faste pour la liberté de presse, qui passe
trop souvent derrière d’autres libertés fondamentales aussitôt que ces
libertés s’entrechoquent».